Les Boyaux d'Uffern

Ils sont les voies sous les voies, les chemins cachés, plus obscurs et plus secrets, plus, beaucoup plus dangereux encore. Ils sont étroits et tortueux comme les intestins du monde, et vous, pauvre fou, vous êtes la nourriture qu'ils digèrent. Ils sont immenses et vides comme le coeur des malfaisants, empli d'échos de pas lointains, des geignements de l'air et des clapotements de l'eau.

Sous le Jardin d'Eden, sous le Royaume entier, ils courent, motif caché dans le motif, filigrane de creux dans la masse noire de la roche et de la terre. Les issues sont multiples, vastes ou minuscules, souvent gardées par ces choses qui aiment le clair-obscur, la frange de la lumière, le presque-jour.

Là, dans les tréfonds, s'ouvrent des portes profondes, et derrière elles, des secrets oubliés. Les lueurs sourdes de vert acide ou de rouge fade, organique, dessinent dans les ténèbres les contours de choses trop régulières, les encoches trop répétées de fresques noyées de lichens et de champignons. Parfois, un éclair métallique, sous la ternissure du temps.

Abandonnée là, repoussée là, toute une histoire enfouie attend d'être découverte.
Depuis le temps, elle meurt de faim...