Le Palais des Délices

Ceint de murs massifs, de portes et de tourelles construits en terre et en pierre, le Palais Blanc, le Palais Rouge et les bâtiments annexes du Palais des Délices se dressent sur la Colline Rouge, au centre du Lac qui marque la sortie du Labyrinthe du Jardin d'Eden. Ce Palais circulaire est largement ouvert sur le jardin. A l'intérieur on pénètre une immense galerie flanquée de deux salons à coupole. Les murs intérieurs sont rythmés par des arcades encadrées de pilastres, les bas-reliefs de bronze et de plomb, les marbres polychromes, le bronze scintillant, le cristal étincelant des lustres, et votre reflet mille fois reproduit par les miroirs en face des fenêtres. Au plafond, des compartiments accueillent une multitude de tableaux. Y figurent les grands évènements qui ont ponctué l'histoire du Royaume. Tous les tableaux sont des allégories qui s’appuient sur une culture savante transmise par les anciens peuples elfiques.

Le Palais Blanc comprend ainsi la grande salle "des plaisirs de la bouche" où vous goûterez aux nourritures sorcières de Monsieur M., maître queux, officiant dans les murs, ses appartements privés, et la salle "des petites perceptions" occupant le dernier étage, lieu plus intimiste où seuls les initiés sont conviés. Dans cette salle capitonnée, totalement coupée du monde extérieur et dont l'entrée est dissimulée par une tenture représentant le plan du Labyrinthe d'Achaïa, on mange des opiacés et des champignons toxiques, maintes substances étranges et enivrantes au pouvoir enchanteur, démoniaque, ou létal... Mais ceci ne sera proposé qu'à celui ou celle qui sait parler aux ancêtres, voyager dans les rêves, à celui qu'un mal obsède, à celle qui n'a plus de raison. Allongé sur de longues nattes recouvertes de soie sauvage, plongé dans la pénombre où vacillent des lumignons il faut être assez sûr de ce que l'on fait quand on entreprend un tel voyage intérieur. car on sait ce qu'on vient chercher, mais on n'est jamais sûr de ce que l'on va rencontrer...

Le palais est à lui seul une véritable île aux trésors: couvert de peintures murales, de rouleaux peints, son espace est rythmé par de nombreuses sculptures, ponctué par des tapis soyeux et épais, des baldaquins, des rideaux, des pièces en porcelaine, en jade, des objets d’art en or et en argent.
Nul ne sait plus d'où tout cela provient. Enfin, c'est ce que l'on vous fera croire...

A l’ouest du Palais Blanc, plus en hauteur, le Palais Rouge, le bien nommé "temple des mystères de la chair", plus petit, mais richement décoré sent, à peine on l'approche, l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens, l'ylang-ylang et le clou de girofle, la vanille et le niaouli.
Mais, mais, n'en dévoilons pas davantage, à vous d'en expérimenter la substance...

Il se tient à l'entrée du Palais des Délices, il trône, en maître des lieux, devant le Jardin d'Eden comme un roi qui contemple ses terres. En livrée quatre pièces, d'un noir soyeux et austère qu'une rose rouge rehausse, enveloppé d'un boa de plumes, les jambes droites comme deux piliers de temple il lève son menton vers le ciel, et, au garde-à-vous devant on ne sait quelle figure invisible, il déclame de sa belle voix de baryton:


Il prend une grande inspiration et débite avec emphase et passion :


Il sourit, satisfait de lui-même, comme un génie contemple son oeuvre avant de la donner au public, la tête dans les nuages, déjà procédant à de nouvelles recettes toutes plus imaginatives et audacieuses les unes que les autres et qui feraient, il le sait, la renommée du Royaume qu'il sert avec application, comme le reste de habitants peuplant la maisonnée.