Royaume d'Achaïa Che'Hina
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Des tours de la mémoire

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Message  Sverker Jeu 19 Juil - 18:10

Un bail qu'il avait quitté le royaume, dans de tristes circonstances, d'étranges circonstances...

Cuisant souvenir des derniers mots d'Anog à son endroit, encore imprimé en lettres de plombs dans sa mémoire, cette blessure presque à vif au flanc, là où était venu frappé la lame froide, là où palpite encore son coeur trop tendre pour s'affranchir des chaînes de chair qui le relient encore à certains autres.

Il en avait tranché quelques-unes, en avait laissé se dessécher certaines, en avait rajouté de nouvelles. Le cirque de l'éternel valse des sentiments... Bourbier que tout cela !
Bourbier, oui. Qui ne laisse personne intact.
Bourbier qui permet d'espérer un peu de fraîcheur...

Et puis, il se remémorait parfois, quand la nostalgie lui tombait dessus en embuscade, les moments lumineux, les moments de grâce, les moments de communion, même s'il n'aimait pas ce mot, trop mystique pour être de son vocabulaire. La chasse en bande, tous unis par le même élan, la même respiration, quelque chose de fou et de primitif, comme si la même fièvre les avait touché tous au même moment.
Une horde sauvage.
Une grande chasse.
La chasse sauvage.

Après le douloureux divorce fraternel entre lui et Anog, il avait évité la région pendant un long moment. Puis avec le temps qui émousse tout, même les plus vifs chagrins, ses longues courses solitaires l'amenaient parfois aux confins du Royaume, sans qu'il le réalise vraiment. Il s'admonestait vivement par des *Merde, qu'est-ce que je fous là ?* et des *Le hasard, mon oeil !*. Quand il s'en sentait les tripes, il s'approchait à distance respectable de cet endroit autrefois synonyme de chaleur partagée et de troubles mystérieux.

A vue pas plus.
Guettait sans se l'avouer un signe de vie.
Un cri.
Une flèche.
Mais rien...

Et puis, le néant les avaient tous engloutis. Enfin l'oubli, l'obscurité, le silence.
Mais pas l'éternité.
Non, rien n'est jamais acquis.
Pas même la fin du monde...

Leur univers avait été sorti des limbes par quelque puissance capricieuse.
Et de nouveau, la douleur de respirer,de sentir, de vivre.
Certains avaient eu la chance d'y perdre leur mémoire et de renaître.
D'autres, comme lui, s'étaient contentés de revenir à eux, engoncés dans des vestiges du passé.

Se relever, pénible ascension.
Réapprendre les gestes de la traque, apprentissage laborieux à cause des souvenirs trompeurs d'une puissance envolée.
Renouer les anciennes amitiés et renouveler les haines, astreignant devoir de communication.
Enfin, la félicité des liens invisibles rajeunis, ou plutôt revigorés, qui lui avait fait retrouver son clan, sa place dans le monde et sa raison de vivre.
Manquait qu'une pièce à ce tableau moitié amer moitié idyllique.

Alors, il avait remonté le Styx à l'envers, avait refait sciemment le chemin jusqu'ici, l'esprit tendu mais prêt à toutes les éventualités, à tous les débordements, à toutes les réserves.
Juste aller à leur rencontre.
Leur dire que le passé était révolu.
Que le présent était tout ce qui comptait pour lui.
Que si rien n'était oublié, la table était rase et pouvait accueillir le verre des retrouvailles.

Un rien nerveux, il posa la main sur la grille.
Respira un grand coup.
*Allez, rôdeur à la manque, vas-y*
Entra.


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Message  L'homme-arbre Ven 27 Juil - 6:37

Un craquement, et le grincement de l’écorce d'un Ent séculaire qui se plie vers le saurus. Le vieil arbre attaché à la grille du Royaume entrouvre ses yeux noirs, comme s'il sortait d'une longue torpeur. L'observe attentivement pour finir par tendre une branche tordue vers la patte écailleuse.

" Il y a des mystère qu'il ne faut pas chercher à percer, des trésors qui doivent rester enfouis.
Tu en as décidé autrement fier archer puisque tu es ci-devant.
Tu es le premier à oser pénétrer dans ce Royaume resté si longtemps endormi.
Vois, comme la nature a reprit ses droits sur les êtres qui ont édifié cette forteresse.
Vanité.... tout n'est que vanité... n'est-ce pas...
Et pourtant ces lieux te reconnaissent sinon tu aurais eut affaire avec d'autres que moi, moins sages et plus hostiles.
Avant que je ne te laisse entrer, réponds-moi valeureux rôdeur, ton cœur est-il prêt à entrer ici ?
Il n'est pas trop tard pour t'en retourner "


Nouveau craquement, l'ancêtre a l'air de sourire.
Au centre du tronc une lueur palpite et fait chatoyer les parois de bois lisse qui entourent une cavité où niche un gros hibou qui fixe de ses prunelles jaunes le rôdeur.
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Message  Sverker Mer 8 Aoû - 0:14

A osé à peine un pas quand un arbre s'anime, ouvrant des billes de jais et s'incline vers lui.
*Qu'est-ce que...*

Lui tend même la branche comme s'il voulait le saluer.
*J'me disais aussi, pas une entité surnaturelle pour filtrer les entrées !*

Ecoute ce qu'il a dire, sur ses gardes, mais calme. Contrarier un gardien de ce royaume n'était pas au programme.
*Toujours aussi imprégné de magie, ici !*

Le végétal savant termine sa déclaration, révélant lentement un grand duc qui le dévisage. Le rapace le traque du regard. C'est son tour.
*Le coeur...*

Touche inconsciemment l'endroit où la dague d'Anog hors d'elle est venue frapper cet organe soit-disant vital.
Inspire et parle doucement, presque à voix basse.

"Salut à toi, vénérable créature. Les mystères, les secrets, toutes ces questions sans réponse, c'est pas mon genre d'accepter sans broncher. La vanité, oui c'est sûrement elle qui me pousse à chercher les pourquoi et les comment. Il m'en a déjà coûté par le passé, ici notamment, et certainement qu'il m'en coutera encore. Mais, c'est de ce bois là que je suis fait !"

Respire encore, sans quitter des yeux le piaf. Regarde de nouveau l'être ligneux et feuillu.

"Quant à mon coeur, il ressemble au tronc d'un vieil arbre. Noueux, tordu, taillé, saigné par endroits de sa sève, elle a même coulé en ces lieux et y a laissé sa marque. Pas étonnant que le royaume me reconnait, j'y ai fait offrande de mon sang."

Rythme respiratoire qui s'agite un peu. Reprend le contrôle. Ton plus posé.

"Donc, ne t'inquiète pas pour lui, je pense pas qu'il craigne encore grand chose. Et puis, c'est pas lui qui décide. En tout cas, ce n'est plus lui... J'y ai trop souvent laissé la bride sur le col et par conséquent, des écailles. C'est comme la richesse, c'te camelote : un bon serviteur, mais un mauvais maître..."

Ricane légèrement. Se reprend sans tarder.

" Donc pour te répondre enfin... Si j'veux entrer ici ? Affirmatif ! Faire machine arrière, c'est contre ma religion. Et puis, j'ai des amis à retrouver et c'est pas dans mes habitudes de renoncer."

Attend le verdict de l'ancien, immobile.


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Message  L'homme-arbre Sam 18 Aoû - 18:32

Le duc s'ébroue, cligne des yeux et d'un lourd battement d'ailes se pose sur le bras du rôdeur tout aussi ligneux que son ancienne cachette, ses serres acérées emboîtées dans les écailles, silencieux, la tête tournée vers son nouveau perchoir à 180 °, et lâche un étrange cri sifflant comme une sorte de crachotement.
Et l'ancien se plie et craque, s'approche plus près du rôdeur, assez près pour qu'il sente son haleine piquante :


« Et bien qu'attends-tu pour passer cette grille ? Ton cœur est assez calleux, endurcit qu'il est par ses multiples blessures pour n'avoir plus rien à craindre de ces lieux ni de ces habitants, dis-tu. Je jurerai pourtant qu'il va encore te jouer des tours ce vieux maître impétueux.
J'ai beau avoir de l'âge, mes sens ne sont pas si usés et la sève nouvelle qui coule entre ces piliers a de quoi bouleverser, la douleur qui traverse mes racines me le dit bien assez »


Le vieil arbre sourit, et dans un affreux grincement enclenche l'ouverture de la grille.
« Va donc retrouver ceux qui ne savent pas encore qu'ils t'attendent. »

[hrp] Désolé pour l'attente... ]
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Message  Sverker Dim 19 Aoû - 10:56

Regarde l'imposant volatile s'envoler rapidement... pour venir se servir de son bras comme d'un perchoir.
*Ben vas-y, le piaf, fais comme chez toi !*

Sourit pendant la réponse du vieux. Aime bien les défis.

"T'inquiète pas, j'suis pas Saurus à reculer. Et tu dois sûrement avoir raison, le vénérable. Qui sait ce que me réserve ce qui se trouve au-delà de cette grille ? Qui sait si je vais pas encore y manger ma part de pain noir. "

Jette un oeil dans celui du rapace qui ne le lâche pas des serres et revient se connecter au regard du gardien végétal.

"La vanité, encore elle... Penser que je dirige ma vie, que j'impose ma loi à mon âme, c'est ma carotte. J'sais bien qu'elle est illusoire, qu'à chaque fois que je crois l'attraper, elle se dérobe. Mais ça me permet d'avancer. Et puis y a l'ironie, ma vieille amie. Le nécessaire contre-poids. Son antidote. Qui parle encore plus fort. Qui pulse à l'intérieur... Elle est dans ma voix, la criarde ; c'est tout mon sang ce poison noir, comme a dit un poète.

C'est mon aiguillon.

Je les laisse débattre de concert, elles prennent chacune brièvement l'ascendant sur l'autre et puis ça change, encore et encore. Cette étrange alternance, ça me tient lieu de courage. Faut bien quand on en a pas. Et tant pis si elles me mènent parfois sur des chemins dangereux, sur des voies douloureuses."


Hasarde un autre pas et franchit complètement le seuil.

"Mais le risque et la souffrance, on nous en fait cadeau à la naissance, non ?"

Salue respectueusement l'homme-arbre d'un signe de tête, le duc encore planté sur son bras et le sourire toujours accroché sur sa face écailleuse.


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Message  Anog Ven 24 Aoû - 13:32



Il y a un moment pour tout :
un temps pour naître et un temps pour mourir,
un temps pour planter et un temps pour arracher ce qui a été planté,
un temps pour tuer et un temps pour guérir,
un temps pour démolir et un temps pour construire,
un temps pour pleurer et un temps pour rire,
un temps pour se lamenter et un temps pour danser,
un temps pour lancer des pierres et un temps pour en ramasser,
un temps pour embrasser et un temps pour s'éloigner des embrassades,
un temps pour chercher et un temps pour perdre,
un temps pour garder et un temps pour jeter,
un temps pour déchirer et un temps pour coudre,
un temps pour se taire et un temps pour parler,
un temps pour aimer et un temps pour détester,
un temps pour la guerre et un temps pour la paix.



Tu l'as lu ce livre, n'est-ce pas ? Sans doute que le vieux mécréant qui se tient sur le pas de ta porte l'a lu lui aussi, et pourtant il n'est pas du genre à écouter les hommes en soutane. Mais celui-là n'est pas comme les autres.

Quel temps est le tiens en cet instant ?
Tâche de ne pas faire d'erreur, on ne lance pas une pièce pour décider de cela en se remettant au seul hasard.

Tu l'entends cette grille qu'on pousse et qui se referme. Ce n'est pas pour rien que la nature a doté les elfes de ces oreilles ridicules.

Tu l'entends si bien ce bruit, ce bruit. Lourd, enraciné.
Ce pas dehors, qui a franchit la grille et qui se dirige vers la porte épaisse à deux vantaux roulant sur des crapaudines usées, et qui grince un peu, juste assez pour ne pas inquiéter et raconter quelque chose d'un passé heureux, vivant, donnant sur la grande salle circulaire.

Tu poses tes fioles sur la table de pierre et tu écoutes, attentivement, oui, plus encore, comme si tu voulais entrer dans ce pas, te confondre avec lui pour mieux sentir son poids et saisir le moindre déplacement musculaire de ce corps qui s'enfonce dans le sol, sûr de sa direction.
Un pas volontaire qui n'a pas son semblable sur ces terres, et pas coutume d'hésiter.
Un pas lent et vigoureux, un pas qui mesure toute chose à l'aulne de la volonté.
Tu sais bien à qui il appartient.
Tu n'en connais qu'un qui fasse vibrer la terre de cette manière.


*Longtemps.... mais... comment... longtemps que... la dernière fois il...*

Ta tête ploie lentement à mesure que le pas s'approche.
Il s'arrête.
Suspendue à ses gestes tu tends l'oreille.
La porte grince sur ses gonds et s'ouvre doucement. La chaleur du dehors pénètre la salle glacée. La poussière vole devant tes yeux et forme un petit tourbillon que tu regardes s'élever, tu redresses la tête, écarquilles les yeux.
Il est là. Dans le contre-jour. Ton vieux compagnon.
Celui que tu aurais cloué comme un vulgaire volatile sur un mur s'il n'y avait pas eut une porte entre vous... Celui que tu as tant chéri. Et que tu as renié.

Tes jambes toutes seules elles avancent, tu ne leur a rien demandé pourtant, mais elles avancent implacablement vers ce faisceau de lumière, et plus elles réduisent la distance qui te sépare de lui, plus elles vont vite, et plus ton visage s'éclaire, et il s'ouvre, et des larmes roulent sur tes joues, et elles coulent et tu n'as pas honte de les laisser filer comme ça, tu les avales.
Tu souris avec tes dents.
Je te regarde sourire et pleurer.
Lui aussi sans doute qu'il te regarde.

A mi-chemin tu t'arrêtes, tes mollets se crispent, incapables de poursuivre.

Tu déglutis.
Une fois.
Tu t'essuies le visage d'un revers de main te ressaisissant.
Deux fois.
Mais elle continuent de couler tes larmes.
Trois.
Tu entrouvres la bouche mais pas un son ne sort de là.
Tu recommences, cherchant ta salive. Tu marmonnes, cherchant le moyen de desceller ta gorge. Et d'une voix blanche, presque tétanisée, arrachée à l'étau qui t'étrangle, tu lui demandes à voix basse.


"C'est toi ?"



Un temps pour déchirer et un temps pour coudre
un temps pour la guerre
un temps pour la paix.

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Message  Sverker Mar 28 Aoû - 0:32

Laisse derrière lui le gardien sylvestre, un léger sourire en coin encore aux lèvres.
*Sacré gars ! Tu croyais lui faire gober ton charabia ?!*
Rit presque.
Retrouve rapidement son sérieux.
S'arrête le temps d'un battement de cœur pour humer l'air.
Sensation de presque chez soi.
Le royaume a changé. En apparence.
Comme un serpent qui a mué.
Mais sous l'écaille plus verte, toujours le même sang, toujours le même coeur...
Soupire. Pose presque sans le vouloir son regard sur le bâtiment qui sert d'entrée.
*Allez ! Trop tard pour faire machine arrière, vieux trouillard...*

S'avance sans hâte malgré la mécanique qui commence à s'emballer.
Pieds fermes qui se mettent à battre la cadence, un stomp-stomp régulier, afin d'assourdir le chaos interne qui se répand petit à petit.
Pupilles qui se rétrécissent et fixent le bout de la route.
Eviter de penser à ce qui a été ou à ce qui sera.
Avancer. Aller la voir. Et aviser.
Essaie de se concentrer sur ses pas, comme s'il marchait en équilibre au-dessus d'un gouffre.
L'un après l'autre. Maintenir la même vitesse. Essayer de calmer le jeu.
Une deux, une deux, une deux, mantra idiot pour tenter de distraire sa vieille caboche.

Souvenirs qui le prennent quand même à revers.
L'espace d'une seconde. Presque rien. Mais déjà trop.
Le bosquet. Un soir de printemps. Premières paroles.
Les nuits à traquer. Les festins partagés.
Sa chambre ici. Une voix prenante derrière la porte.
Le métal qui crucifie le papier sur la pierre.
La rage folle qui gronde.
Une tour qui s'écroule.
Sait plus trop si c'était hier
Ou il y a un siècle.



Vieux film en vrac.
Tripes nouées.
Se remettre à compter.
Une deux, une deux, une deux...
Pression qui redescend à peine.
Encore quelques pas...
La porte à double battant qui attend d'être ouverte.
* T'es venu chercher quoi, lézard sur le retour ?
Une part manquante ?
La mémoire vivante de ton coeur ?
Une douleur qui effacerait les autres ?
La catharsis puis la rédemption ?*



Respire maintenant, tant que c'est possible.
Pose ses mains un peu tremblantes sur les ventaux.
Les pousse sans forcer.
Comme s'il avait peur de se faire remarquer.
La voie est ouverte, plus qu'à rentrer.
Reste là, attend que sa vision s'habitue à la pénombre.
Reconnait instinctivement sa silhouette blanche à la faveur des lumières colorées des vitraux.
La voit qui vient vers lui, son beau visage grave et sombre faisant comme une tâche de marbre dans la demi-obscurité.
Gorge qui se noue.
Reste cloué sur le seuil.
Souffle court.

La regarde s'approcher comme un animal affolé, le pas nerveux, la figure tendue.
Lui aussi n'en mène pas large, mais l'oublie presque, captivé par cette vision iréelle.
Le trésor de son sourire naissant.
L'éclat vivant de ses yeux.
Les larmes en cascade sur sa peau d'albâtre.
La nacre de ses dents qui se découvrent en croissant et recueillent la coulée de diamants.
La voilà qui se plante à mi-parcours et qu'elle essuie l'eau salée sur ses joues comme une gosse.
Une gamine qui vient de retrouver une vieille bête qu'elle croyait avoir perdue.
Et ces paroles simples, arrachées au silence, portées par la puissance du murmure, qui finissent de le chavirer.
Sourire ému qui s'esquisse de lui-même sur sa face écailleuse.
Fait le reste du chemin vers sa petite sœur retrouvée.
Atterrit tout près d'elle.
Doucement, essuie une larme sur sa pommette d'un pouce fébrile.
Sans cesser de la contempler, se remet à respirer.

"Oui. C'est moi."


Se demande comment se comporter avec elle depuis tout ce temps...
Un quart de seconde plus tard, l'étreint avec toute la délicatesse dont il est capable.
Laisse échapper dans un soupir heureux.

"Je suis là."


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Message  Anog Sam 1 Sep - 1:28

Il franchit la distance.
Près de toi il sourit.
Son coeur bat si fort que tu pourrais croire que c'est le tiens.
Tout contre toi maintenant.
Son pouce efface les dernières larmes dans un geste tendre et fraternel qui fait battre ton coeur plus fort.
Tu le sens dans ta gorge comme une boule brûlante.
Il te serre contre lui, doucement. La masse de son corps se fait plus légère, quelque chose au fond de lui semble s'envoler.
Il soupire. La voix basse est grave, elle ne tonne pas.


"Oui. C'est moi. Je suis là."

Tu soupires. Dedans ça tangue et tout chavire.

Et plus bas encore, nichant ton nez dans ses bras tu lui souffles:


"Tu es là... tu es revenu... c'est si ... important de... que...
oh...
...



pardon...

pardon pour... toutes ces folies... la colère... d'hier... je n'ai pas supporté... que..."


L'angoisse t'interrompt, les souvenirs qui affluent comme une marée noire.
Tu te dis que tu ne pourras jamais lui dire la vérité.
Ce que tu aurais pu lui dire dans ce temps là où vous combattiez côte à côte, où il t'était devenu si indispensable, si proche que tu ne le distinguais plus de toi-même.
Que de brutaux réveils t'ont déchirés la tête quand tu l'as vu partager sa vie avec le reste du monde.
Quand tu ne fût plus son seul horizon.
Tu ne l'avais jamais été. Tu avais vécue ton rêve sans lui demander ce qu'il avait à en dire. Tout était si claire, si simple pourtant, dans ta petite tête, vous étiez comme les membres d'un même corps.
Tu avais la rigueur des jeunes âmes qui portent des destinées trop lourdes, et ta naïveté faisait figure d'intransigeance. Le monde se divisait en deux parts parfaitement égales. Faites de noir et de blanc. Tu ne souffrais aucune nuance de gris, aucun écart sur la ligne droite que tu t'étais fixé. Et il en allait ainsi de tous ceux qui embrassaient ta route.
Aucun tremblement.
Aucun doute.
Aucun appât n'aurait dû distraire ceux qui te choisissaient.
Soeur illuminée, trop engagée dans ta foi pour qu'il y comprenne quelque chose, lui, le mécréant.
Que pouvait-il savoir de ces sentiments naissants que tu ignorais toi-même et que tu étouffais dans l'oeuf par méconnaissance.


"... que nos chemins divergent....
que...
que tu ne sois pas... "


La honte de l'aveu te saisit avant même que tu achèves et tu t'enfouis davantage dans le creux de ses épaules pour cacher ta rougeur, crispant tes doigts dans le vieux cuir, incapable d'en dire davantage.

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Message  Sverker Jeu 13 Sep - 0:24

Temps et espace aboli, un instant.
Juste un instant.
L'univers réduit à cette étreinte.
Elle et lui.
Elle, dans ses bras à lui.
Geste qui lui est venu comme un instinct oublié.
Un lapsus.

Réalise à peine.
Le miracle de cette rencontre.
Et son risque vertigineux.
Prend la mesure de l'exploit qu'il vient de réaliser.
Sauter par-dessus un gouffre qu'il croyait infranchissable.
Souffle qui s'emballe alors.
Guibolles qui cotonnent.
Essaie de n'en rien montrer.

Sa voix chuchotante qui le sort de sa fébrilité.

"Tu es là... tu es revenu... c'est si ... important de... que...
oh...
...



pardon...

pardon pour... toutes ces folies... la colère... d'hier... je n'ai pas supporté... que..."


Là.
De nouveau.
Et elle aussi est là.
Ce "là" sans aucune valeur, aucun sens, aucune saveur si elle ne le partageait pas.
Il avait toujours voulu être là.
Avec elle dans ses bras.
Sa vivante présence vaut tous les pardons.
Efface toutes les blessures.

L'écoute, presque ivre de la savoir si proche.
Reste pendue à ses lèvres quand elle se tait,
Laissant une écorchure dans le velours irrégulier de ses paroles.

"... que nos chemins divergent....
que...
que tu ne sois pas... "


Sa voix basse, en suspens, comme un oiseau fléché en plein vol.
Son visage si beau et si triste qui disparait dans les reliefs de son torse.
Ses mains fines qui se cramponnent aux arrêtes des écailles.
Un tremblement infime qui agite brièvement sa vieille carcasse.
Se rend compte qu'il ne l'avait jamais touchée avant.
Pas même effleurée.
Pas tactile pour deux sous, jamais il n'avait osé poser ses sales pattes écailleuses et grossières sur elle.
Pour lui, frustre terrien, l'elfe diaphane était une créature céleste.
Même si parfois, ses cieux étaient couleur charbon.

*Que je ne sois pas...*
Et là, il l'enveloppe de ses bras comme pour l'abriter de ce silence si tranchant.
Et elle ne l'a pas foudroyé du regard, elle reste contre lui, s'y accroche même...

*Anog, jamais je n'ai eu d'autre souhait...*
Jamais il n'aurait pu espérer autant d'intimité de sa part.
Jamais il n'aurait cru entendre pareil aveu muet venant d'elle.
Fragment d'éternité qui resterait gravé dans chaque fibre de son être.

*L'aurais-je été vraiment?*
Boussole intérieure qui perd le nord et se met à dériver.
Vieux tambour agité qui pulse tout contre sa poitrine étroite.
Et le doute affreux qui rampe à l'envers de toute l'horlogerie.

*Et combien de temps ?*
Lutte tant qu'il peut pour garder le cap,l'équilibre, ferme les yeux et s'appuie un peu sur elle.
Deux créatures incomplètes qui se tiennent l'un à l'autre pour rester debout.

*Anog, si tu savais ...*

"Que je ne sois pas..."

Ange plein de bonté, connais-tu le vide

L'horreur de ce "pas", le revers de la médaille de ce "là" si essentiel...
Baisse un instant sa vieille caboche pour venir frôler sa joue de son muffle.
Reste ainsi 10 bonnes secondes qui filent à la vitesse de la lumière.
Relève enfin la tête.

"Anog, jamais je n'ai eu d'autre souhait que d'être...

...avec toi
De former un tout....

Mais aurais-je jamais pu être ton complémentaire ?

Et la peur de faillir, et ce tourment hideux
L'aurais-je été vraiment ?
Y avait-il la place dans ta vie pour que j'y sois ?
Et cela t'aurait-il suffit ?

Et combien de temps aurais-je su capter toute ton attention ?
Aurais-je pu toujours nourrir ton coeur à sa faim ?
Qui le sait ? Pas moi... Je suis juste certain que je n'aurais pas supporté de t'avoir déçue, même si des fois, je me demande si..."

De lire la glaciale horreur du vif désaveu

Soupire.
N'arrive pas à décrocher.
Veut pas la lâcher.
Mais sait pertinemment que la nostalgie est une horrible piquette qui laisse un goût amer dans la bouche et une sale gueule de bois.
S'arracher à son attraction.Même juste un peu.
Se recule un peu pour pouvoir la regarder.
Dans tes yeux où longtemps burent mes yeux avides ?

"Si tu savais combien j'ai chéri l'époque bénie où nous formions une unité !"

Reste bloqué sur ses 2 iris.

"Si tu savais..."

Secoue doucement la tête d'un côté à l'autre sans quitter ses prunelles.
Ebauche de sourire.

"Nos chemins n'ont pas divergé, ils se sont juste suivis en parallèle... Et tu peux pas savoir comme ça me réjouit qu'ils se soient rejoints!"

Ebauche qui gagne de l'ampleur et du terrain.
Lui remet une mèche de cheveu sur l'oreille.

"Il nous reste à nous réinventer une complémentarité, à redevenir de vraies complices, à reformer une entité."

L'embrasse délicatement sur le front.



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Message  Anog Sam 15 Sep - 23:18

Ses mots. Son regard. Son sourire. Qui s'étale sur son visage. Ses mots. Sa tendresse. Son étreinte. Et dessous, le volcan. Son regard.
Le baiser, chaste baiser, à ton front.
Les mots qui se mélangent et percutent tes bords comme les dés jetés sur le tapis. Se cognent. Cognent ta tête. Cognent. Sur ton front.
Le baiser, comme il tonne dans ton ciel noir d'orages. Craque dans ta cervelle. Tout craque.
Former un tout. Un tout.
Tout dévale comme une coulée de cailloux dans ton corps ça ruisselle, ça coule, les larmes, le sang, l'étreinte, les bras, ils sont mille, qui te retiennent et tu t'effondres, dans ses bras, tu t'abandonnes, enfin quelque chose s'abat en toi, l'ultime résistance.
Ses mots, coups de hache dans ta carcasse, t'abattent.
Fracassent.
T'émiettent.
Te cisaillent.

Il t'écarte.
Il défait l'étreinte, il te décortique, doucement décortique l'armure, la peau, en déchire les coins. Désourle ta pudeur.
Tes cheveux, prend tes cheveux, là, derrière ton oreille, frisson dans ta bouche, à l'intérieur de tes joues. Tu trembles.
Affronter les yeux, après.
Après, lever les tiens.
Le froid des quelques centimètres où l'air passe entre vous.
Froid sidérant.
Tu l'observe clignant des yeux, cherchant, déchiffrant sur sa bouche.
S'il y restait des syllabes oubliées, imprononcées, imprononçables ?
Paroles décomposées, recomposées.
Un tout.
Réinventer cette complétude.
Oui inventer tu te dis encore tremblante.
Davantage.

Et tu ne veux pas que cesse l'instant. Tu ne veux pas réfléchir. Tu ne veux que lui, tout.
Et tu ne veux pas qu'il s'arrête de parler. Tu es comme une enfant qui ne veut pas dormir, et les histoires, les histoires raconte-moi.
Tu ne veux pas qu'il s'arrête de sourire.
Tu veux figer le temps.
Retrouver l'étreinte.
Après, demain... ce sera demain que tu penseras.
Tu ne veux pas qu'il s'arrête de te serrer dans ses bras, vaste vaisseau, si vaste pour arpenter ce monde, tu veux y loger, naviguer, là,
sur un océan de lait, noir d'encre, bercée par le roulis.
Tu rends le sourire.
Tu rends les yeux ardents.
Tu donnes ce que je ne peux pas écrire.
Mais les mots restent dans ta gorge, et ils brûlent. Trop d'émotions te submergent pour que tu sois intelligente et donner le moindre signe de pensée claire.
Mais tes yeux,
et le rouge
et le bleu
laissent entendre que tu veux tout, tout ce qu'il a prononcé.
Ce qui existe et ce qui n'est pas.


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Message  Sverker Dim 14 Oct - 12:40

Ses vieilles lèvres, d'écailles plus fines et plus lisses que le reste de son visage d'ordinaire si peu amène, ces lèvres qui ont bu le sang des ennemis et dévoré leur coeur lorsqu'il était plus jeune et perpétuellement en colère, ces lèvres qui ont craché de cinglantes invectives et persifflé le mépris le plus froid, ces lèvres qui ont éructé tant de fois sa rage trop grande à contenir et grondé les ordres sur les champs de batailles, ces lèvres qui parfois ont murmuré dans la solitude de la nuit sa douleur de vivre et ont avoué honteusement ses peurs les plus secrètes, ces lèvres-là, habituées à la mort, au sang, au poison, au froid et à la trouille, elles lui semblent impossibles à les décoller tellement elles paraissent vivantes à nouveau,là,sur la peau tiède et douce du front de celle que jamais il n'a pu oublier, son vieux palpitant bat à travers elles et c'en est tellement c'est bon que ça lui fait presque mal, comme une partie gelée du corps qui se réveille à la chaleur d'un feu de bois, tout son être concentré dans ces deux lames de chairs hyper innervées, tout ce qu'il y a d'encore intact en lui vibre sur la musique de leurs épidermes enfin unis.

Séisme sous-cutané, les nerfs qui retrouvent la mémoire, et ses doigts le goût presque amnésique de caresser. Courants telluriques oubliés qui se fraient un chemin à travers les fissures et viennent éclore comme des fleurs de plante carnivore. L'appétit, celui qu'il a éprouvé une ultime fois lorsque la sauvageonne était revenu lui dire ce qu'il avait tant attendu, tant qu'il n'y croyait plus, cet appétit d'une autre lui déchirait les entrailles.

*Tu fais quoi là, croco sénile ? T'es pas en train de te mélanger les pinceaux ?*

Ca faisait si longtemps, depuis la rôdeuse, que ces vieilles lèvres n'avaient rencontré chair tendre et aimée qu'il vit ça comme une torture de les faire battre en retraite, mais il le faut, il le faut parce que... parce que rester plus longtemps c'est dangereux lui siffle sa voix intérieure. La conscience du vide que la centauresse farouche a laissé dans sa vie le dégrise un peu. Essaie de retrouver une contenance, une rigidité qu'il a toujours considéré comme de la droiture et qui n'incarne que sa peur de faillir. Presque effrayé par la vigueur de son élan, se recule un peu comme s'il était sur le point de faire la plus grosse connerie de son existence. Tombe sur ses yeux bicolores, trop brillants, trop grands, trop habités qui le boivent. Et son sourire, son lumineux sourire qui chante en silence la vie sauvage qui l'anime.

Et la foudre de ses prunelles le saisit, l'électrocute si violemment qu'il se retient à elle pour pas flageoler sur ses pattes, comme un boxeur groggy qui essaie de retrouver ses esprits. C'est l'arôme subtil mais prégnant de son corps mince qui vient le cueillir en douceur et achève de le faire flancher.

Dans l'ivresse de son parfum de forêt et de pluie, S'oublie complètement et la reprend encore dans ses bras toujours fébriles, la serre contre lui avec une douceur maladroite car inédite pour lui, ne peut s'en défaire même s'il sait qu'il ne devrait pas, que c'est pas lui rendre service, que le coeur est un piètre conseiller et qu'il sait pertinemment que ce geste le transcendera autant qu'il le condamnera mais c'est plus fort que lui, elle est là, elle l'accueille, le recueille même, l'étreint avec tant de force et de sincérité que c'en est un miracle.
Sait plus où elle commence et où il finit, et tant pis si c'est une erreur, il leur a fallu tant de douleurs muettes pour s'apprivoiser mutuellement et une vie ne leur a pas suffit pour vraiment se rencontrer...


Dernière édition par Sverker le Jeu 10 Jan - 22:14, édité 1 fois
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Message  Anog Lun 17 Déc - 10:09

Il rend l'étreinte.
Il rend chaque pulsation.
Tu te réfugies dans le caisson de son corps sans issue. Goûtes de chaque millimètre de ta peau le baiser brûlant qu'il t'adresse et diffuse la fièvre à ton front.

Tu ne diras pas combien de fois tu es venue frapper à sa porte.
Tu ne diras pas ton désir de le hanter toujours, usant des sorts les plus noirs que ta souffrance ait pu concevoir pour qu'il ne soit qu'à toi sans jamais l'être. Le fuyant sans fin au moindre pas en avant.
Tu ne lui souffleras pas ce que tu as convoité de ses trésors encore vivants enterrés sous l'armure.
Comment tu l'aurais pétri, mâché, dévoré ce coeur si généreux si fragile s'il te l'avais donné.
Tes bras, longs bras de pieuvre enchâssés à faire craquer le cuir de la cuirasse, les yeux clos laissant couler le flot des images passées.
Il est temps que tu t'éloignes.
Il est temps d'apprendre à lui laisser la place qui lui convient dans ton existence.

Doucement l'étau de tes mains se desserre.
Ton corps glisse comme un poisson échappant à ses rets.
Tu le regarde droit dans les yeux.
Et tu ne souris plus que de ces deux iris qui flambent dans ton visage pâle.

" Il n'est plus d'ombre en plein midi. Je serai encore à tes côtés demain à chaque bataille. "

Tu saisis la vaste main. En écarte les doigts. Enfouis ton visage qu'elle recouvre entier. Tu la baises.
La paume nue. Cette surface sans aspérité. Qui ne connait que la caresse du fer.


"Je sais qui tu es. J'apprendrais à supporter... le reste."


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Message  Sverker Mar 18 Déc - 2:58

Une chose a changé
Dans l'air plus si léger
Une vague odeur d'ozone
Fine saveur de métaux lourds
Atmosphère qui se charge de plomb
La bise sifflante répond au tendre baiser
Réintègre déjà son corps vêtu d'airain.
Changement de registre soudain
Passage en mode mineur
Retrouve la pesanteur,
Sa jolie mine grave

Vieille voix intérieure
Qui clignote en rouge sang,
Comme au sale vieux temps
Des blessures saignant en secret
Fermez les écoutilles et baissez la tête
Cramponnez-vous, ça risque de secouer !
Les pieds solidement plantés au sol
Se tient là parce que pas le choix
Rêve d'être ailleurs qu'au froid
De ses yeux et de sa voix
Qui le fixe et le fige

Garde le silence
Qui, seul, empêche
Que son intérieur s'affaisse
Croule sous le poids de l'armure
S'effondre à cause du vide qui se créé
Là où le brûlant espoir a déserté
Comment a-t-il pu croire
A ce bonheur vibrant
Trop beau pour
Etre vrai

Comment se fait-ce
Que la si vive euphorie
Aussi vite se fane et se tarit
Le nectar, perdant de la chaleur
Perdit hélas une partie de sa saveur
Et ses mots d'acier, coupants et glacés
Sur le soleil au zénith qui écrase
La moindre tâche d'obscurité
Où cacher son humanité
Et se réduire à ne vivre
Que lors de bataille

Piètre condition
Redevenir corbeau
Funeste oiseau de proie
Arpenteur des massacres
Qui est-il, sinon ce crocodile
Trop fier et, sûr, plus assez brave
Pour n'exister que par l'acier
Des lames et des cuirasses
Aurait aimé être plus
Qu'un frère d'arme :
Un compagnon

Pas un hôte
Autre chose qu'un
Invité un rien gênant
Un ami un peu encombrant
Ne veut pas qu'on le supporte
Refuse l'écume du dépit à ta bouche
Lui préfère la franche amertume
De s'être de nouveau trompé
Essaie en vain de l'avaler
Aigre saveur de rouille
Qu'il sent jusqu'à l'os
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Message  Anog Mar 18 Déc - 23:22

A peine ton visage arraché d'entre ses mains que dans l'écart creusé par cette fin d'étreinte un vent glacial vient s'engouffrer.
Tu ne peux être à demie.
Il te le clame ce corps là.

Le sourire de tes yeux s'éteint.
Ta lèvre tremble.
Tu vas chercher au fond de ses rétines la cause de son désarroi.
Quelque chose s'est affaissé dedans son corps, ne laissant qu'une mue rigide.
Un visage scellé.

Tes doigts de nouveau l'attrape, vacillant dedans.
Cherchant à garrotter cette joie qui s'échappe comme le sang.
Chacun d'eux enlace son semblable et le contraint de ne plus bouger.
L'oblige à te regarder.
Au fond tout au fond de toi où il n'est nulle obscurité.
Ta voix, hésite.


"Sverker... tu sais tout de moi..."

Tes yeux brûlent.


"Je ne sais pas être..."

Ta cervelle flambe dans son silence.

"J'ai eut si peur. Avant..."

Tu t'agrippes.

"Je ne suis bonne qu'à guerroyer. Si je fais choir l'armure...


Mon bras est plus sûr..."



* Nous irons en enfer.... De cet enfer infâme qui fait crever jour après jour chaque floraison. *

"Je préfère la mort au combat que faillir un seul jour à tes côtés et j'aime mieux te savoir mort plutôt que voir un jour la flamme dans tes yeux s'éteindre.
Et tes bras lassés."



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Message  Sverker Lun 14 Jan - 22:24

Ses mains qui se verrouillent autour de lui.
Qui l'ancre dans le moment.
Qui l'empêche de choir.
Qui le rattrape avant de boire la tasse.

Et le sauve de la noyade.

Revient à lui, depuis ses profondeurs.
Revient à elle aussi, se raccroche à son regard.
Regard sans concession mais sans mensonge.

Et la remercie en silence.

Feu au fond de ses yeux trop brillants.
Qui dissipe ses ténèbres.
Qui lui montre le bout du tunnel.
Qui lui réapprend la chaleur.

"Sverker... tu sais tout de moi..." 

Ne pense pas tout savoir d'elle mais la croit.
La croit avec espoir, même s'il avait banni ce mot trompeur de son lexique.
Et même si ce n'est pas complètement vrai,
Il faut croire à l'histoire qui est sienne :
Elle reste le plus beau mystère de sa vie. Le plus fort aussi.

Elle aussi sait tout de lui.
Ses forces.
Ses faiblesses.
Ce reste qu'elle dit pouvoir supporter à l'avenir.
Lui qui a déjà du mal à l'endurer...

Pas sûr qu'il en réchappe, de lui imposer sa médiocrité...
Rien ne peut échapper à la lumière
De ses prunelles incandescentes !
Tente de faire face, encore, toujours...
Un lézard ébloui par un éclair permanent.

"Je ne sais pas être..."

Sait pas non plus.
Essaie aussi d'être....
D'être à la hauteur.
D'être celui qui mérite de se battre à ses côtés.
D'être celui qu'elle attend.

* Tu es la pluie, la foudre et le tonnerre.
Et le soleil qui suit aussi.*

Vœu silencieux et désespéré d'être meilleur...
Aveu d'impuissance sourd qui l'assaille.
Ferme les yeux un instant, bloque ses poumons.
Retourne à la nuit dans laquelle il peut se fondre.
Où il peut redevenir cet être si commun, si imparfait.

*Et moi, cette terre gaste
usée, lessivée, crevassée par le temps...*

"J'ai eu si peur. Avant..."

Ses doigts fins
Ses doigts à elle
Qui s'incrustent avec force dans son vieux cuir rayé.
Qui ressuscite son système nerveux en perdition
Qui redore intérieurement son blason

* Doit y avoir erreur sur la personne... *


Respire et fait de nouveau circuler son sang.
Réapprovisionne ses neurones fatiguées en précieux oxygène.
Redécouvre le monde sous un autre jour.
Retrouve un peu de confiance meurtrie.
Réapprend la trouille qui sommeillait en sa chair.

* Avant... Avant, nous nous sommes déchirés,
et j'ai eu la frousse de ne jamais te revoir *


Cette peur antique qui ne l'a jamais quitté,
Qui lui colle aux écailles,
Qu'il n'a pas vraiment réussi à semer
Quelques soient ses errances ou ses voyages
Et qui là, trouve une nouvelle jeunesse.

*Mais là, c'en est une autre, une pire
A la hauteur de mes plus violentes espérances clandestines*

Cette noire frayeur qu'elle se rende compte
Qu'il ne vaut pas grand chose...
Voire rien.
Rien d'autre que ce tas de vieille barbaque sèche
Tout juste bon à tuer de loin. Et encore...

Rien de plus qu'un vieil automate retors au verbe acide
Une machine de guerre fatiguée de livrer une guérilla sans fin.
Un combattant au courage inégal, à l'art vicieux de tuer.
Rien de prestigieux ou de glorieux là-dedans, non...
Juste la pénombre et la mort à distance

"Je ne suis bonne qu'à guerroyer. Si je fais choir l'armure... 

Mon bras n'est plus sûr..."


Voudrait tant lui dire qu'il n'en est rien.
Qu'elle brille ailleurs que dans la bataille.
Que la vie sans elle serait tellement plus infâme et
Que ses talents de combattantes n'y sont pour rien.
Se mord la langue.

"Je préfère la mort au combat que faillir un seul jour à tes côtés et j'aime mieux te savoir mort plutôt que voir un jour la flamme dans tes yeux s'éteindre. 
Et tes bras lassés."
 

Ne veut pas être le défaut dans sa cuirasse
Respectera son vœu d'être une vierge de guerre
Plus que jamais, il se tiendra à ses côtés
Afin de toujours être là pour l'épauler
Et faire office de brancardier ou même de bouclier.

*Pourrais-tu un jour, sans le vouloir,
la condamner, ou pire la trahir ?*


Et en son coeur de métal rouillé,
Gardera tout l'humanité vibrante
Qu'elle fait battre à chaque regard,
Chaque parole, chaque geste
Envers lui, honneurs qui le surprennent chaque fois.

Relève lentement la tête, la regarde droit dans les yeux,
Et droiture et détermination reprenne possession du visage
Frêle esquisse d'un sourire en coin
Le geste assuré et lent d'un doigt
Qui se pose sur sa bouche.

" Anog Ite Ankhmet, ma Soeur d'armes et de pensées, les liens qui nous unissent ont été forgés dans et par le feu, le sang et l'acier.
Mais ce qui nous tient ensemble transcende les limites des champs de bataille et nous animera jusqu'à la fin de ce monde et bien après.
Le même tourment nous incendie. Et nous illumine encore quand le fracas du métal qui cogne le métal ou le bruit mouillé des lames qui taillent la chair cesse un peu.
Mes bras ne cesseront de jouer de l'arc et de nous serrer les coudes que lorsqu'ils seront brisés ou tranchés.

Et ma flamme brûlera tant que tu sera là pour la voir. "
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Message  Anog Mar 19 Fév - 12:47



Ne jamais s'arracher à cette étreinte.
Ne jamais le quitter.
Ne plus jamais interrompre ce moment.
Qu'il dure jusqu'à la mort.
Qu'il aille jusqu'à son achèvement...
Dans tes yeux brille cette folle envie. De ne plus bouger. De n'être qu'à lui. Contre lui.
Perdue dans ses mots. Caressée par ses mains. Enchâssée.

Folie.
Folie.

Tu te le dis cent fois.
Mille fois.
Des millions.
Qu'il faut s'arracher de cette fusion mortelle. Que tu n'en as pas le droit.
Que vos sentiments valent bien mieux que cela.
Oui, il valent bien davantage que cette mort absurde.
Inutile.


Ses yeux se plantent dans les tiens. Sûrs d'eux. Quelque chose s'est redressé dedans, tout au fond. Une certitude inébranlable.
A nouveau ton visage s'éclaire comme un ciel lavé par une tempête salutaire.
Tu sais qu'il sera là, quoi qu'il arrive. Que la Censure sera indéfectiblement, comme elle l'a toujours été, à vos côté quelque soit le combat qu'il vous faudra mener.
Et son doigt se pose doucement sur ta bouche. Si délicat. Si tendre. T'invitant à taire les doutes qui t'assaillent quand il est question de toi quand tu n'es plus l'elfe de guerre. Quand, à l'abri derrière la magie de ces murs, tu peux laisser parler cette chose si étrange qui forme le noyau de ton être enfantin et mélancolique.
Cette seconde naissance qui t'offre une seconde jeunesse est si différente de ta première émergence. Ta foi ébranlée te rapproche de lui. Et tu aimerais qu'il soit toujours ainsi ton vieil ami, lumineux malgré le désespoir.
Et tu fonds sur sa pénombre comme un oiseau. Celle qui obscurcit ses yeux si souvent, celle qui étouffe cette beauté hurlante qui sommeille en lui et qu'il t'arrive de voir quand il oublie de lutter, parfois. Tu retires son doigt de ta bouche, pose sa main contre ta poitrine.


« Mes yeux ne se fermeront plus. Où que tu ailles je serais là. Je serais là pour les tiens de la même façon.
J'aimerais qu'ils viennent. Qu'ils retrouvent les miens. Je sais que tu n'aimes pas tellement les grandes festivités mais je serais comblée de les avoir auprès de moi, de leur parler, de les toucher, de leur présenter Night Shade et Lenislas, de les accueillir comme il y a longtemps. D'entendre leur rire.
Je sais bien que nombre d'entre eux ont disparus. Que certain même t'ont trahi. Comme il en a été de même pour nous....

Mais que ceux qui restent viennent partager le pain et le sel.
Serais-tu d'accord pour sceller nos retrouvailles par une nuit blanche dans le jardin ?

On ne prépare jamais si bien la guerre qu'en l'exorcisant. »



Tu tiens toujours sa main plaquée contre ton coeur. Il faut achever maintenant.
Il faut renoncer.
Renoncer à tous les désirs qui t'ont traversé.
Renoncer c'est choisir.

Ta gorge se serre.
Il te faut la lâcher cette main.

Dans tes yeux il peut la lire cette supplique.
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Message  Sverker Mar 2 Avr - 23:34

Respire comme au sommet de l'Everest.
La lâche pas des yeux.
Ses yeux...
Des yeux comme les siens, jamais il n'en a vu d'autres.
Des yeux qui boiraient l'univers.
Des yeux qui vous dévoreraient presque sur place.
Deux étoiles doubles, bleue et rouge, qui vous réchauffent, vous illuminent.
Ou vous calcinent.

Le silence crépite maintenant dans la pénombre.
Seul le feu de ses prunelles déchire l'espace.
Eternité provisoire d'attente inquiète.
Vague pressentiment d'un dénouement.
Se prépare sans se l'avouer au pire.

La tendre surprise de sa main fine sur la sienne
Qui la prend avec soin,
Et vient la poser sur sa poitrine,
Au centre, légèrement vers la gauche.

Son coeur...
Son coeur de femme.
Sous sa main de demi-homme.

Battements merveilleusement vifs.
Qui pulsent avec force contre les écailles de sa paume.
Qui passent à travers son cuir patiné comme les rayons solaires à travers un voile.
Qui viennent remplir toutes les poches d'obscurité vide qui le gangrénaient petit à petit.

Léger tremblement.
Mémoire sans relâche qui relève l'étrange symétrie.
Le renvoie des années en arrière.
Le même geste.
La même fin ?
Avale sa salive comme il peut.

Ses paroles, aimables, accueillantes
Qui le ramènent sans heurt au présent, loin du passé tragique.
Qui le réveillent en douceur et le réintègrent dans le monde des vivants.
Qui lui garantissent sa lumière bienveillante.
Qui chantent la chaleur de l'unité et  le bonheur d'être ensemble.

Hoche lentement la tête, sans la quitter des yeux.
Sourit malgré lui, sans s'en rendre compte.
Voudrait lui répondre.
Voudrait lui dire.
Combien elle lui a manqué tout ce temps
Combien elle lui manquera jusqu'à la fin des temps
Combien il voudrait qu'ils ne soient pas réduit à ce qu'ils font, en tout cas pas tout le temps.

Sa voix qui résonne encore dans son esprit.
Son coeur qui bat toujours contre sa main.
Ses yeux  rivés aux siens.

Le silence à nouveau, plus dense.
La joie qui commence à s'évaporer.
La plainte mutique de ses iris qui monte en impuissance.

Le tourment qui gronde en elle.
Les cicatrices qui se réouvrent en lui.
Les lois de l'attraction en lutte avec la raison d'être.

Essaie de respirer, tant bien que mal.
D'avaler sa salive aussi.
Et surtout de tenir le coup, encore et toujours.
Sait ce qu'il lui reste malheureusement à faire.

Tire aussi fort que possible sur ses vieux poumons
Contenir l'émotion, ne pas lui laisser le temps de fleurir
Sinon jamais il ne pourra accomplir ce sacrifice.

Jamais il ne pourra renoncer
A l'atroce douceur de sa peau
A la douloureuse chaleur de son sein
Au redoutable rythme de la vie qui bat en elle


Se prépare à la déchirure imminente.
A retourner le couteau dans la plaie.
A faire saigner le silence.

Ferme les yeux,
Fait taire la pluie qui menace,
Bâillonne l'envie de rester là, tout contre elle.
Se fait violence pour ne pas la serrer encore une fois dans ses bras.

Sait désespérément qu'il lui faut trancher ce délicieux lien physique,
Qu'il doit s'arracher à l'astre le plus brillant de son univers,
Que s'ils restent ainsi, ils vont se perdre l'un (dans) l'autre.

Réouvre les yeux,
La regarde de nouveau, la tête un peu penchée,
Inspire gravement,
Tente de lui sourire,
La mort dans l'âme.

Sa main...
Sa main qui peine...
Sa main qui s'efforce d'abandonner...
Sa main qui abandonne l'incroyable texture de sa peau,
Qui se désolidarise du tumulte qui l'anime
Qui se délie fébrilement de ses doigts fins,
Qui s'ampute de son corps aimé,
Qui condamne son propriétaire, par ce geste.

             
Au manque à perpétuité,
             A la prison de sa vieille viande solitaire,
             A l’enfer glacé de sa vie.

Respire comme au dessous du volcan...
La lâche pas des yeux.
Ses yeux...
Des yeux qui lui ont demandé l'impensable
Des yeux qui ont su porter ce terrible mais  nécessaire éloignement de
Deux étoiles doubles, noire et blanche, pour qu'elles continuent à se réchauffer, à s'illuminer.
Sans qu'elles ne finissent par se calciner.
Sverker
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